Zouleikha ouvre les yeux

Un roman de Gouzel Iakhina publié chez les éditions Noir sur Blanc

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Nous sommes au Tatarstan, au cœur de la Russie, dans les années 30. A quinze ans, Zouleikha a été mariée à un homme bien plus âgé qu’elle. Ils ont eu quatre filles mais toutes sont mortes en bas âge. Pour son mari et sa belle-mère presque centenaire, très autoritaire, Zouleikha n’est bonne qu’à travailler. Un nouveau malheur arrive : pendant la dékoulakisation menée par Staline, le mari se fait assassiner et sa famille est expropriée.

Zouleikha est déportée en Sibérie, qu’elle atteindra après un voyage en train de plusieurs mois. En chemin, elle découvre qu’elle est enceinte. Avec ses compagnons d’exil, paysans et intellectuels, chrétiens, musulmans ou athées, elle participe à l’établissement d’une colonie sur la rivière Angara, loin de toute civilisation : c’est là qu’elle donnera naissance à son fils et trouvera l’amour. Mais son éducation et ses valeurs musulmans l’empêcheront longtemps de reconnaître cet amour, et de commencer une nouvelle vie.


Zouleikha, paysanne tatare, ouvre les yeux ? Mais sur quoi ?

La vie d’avant, pleine de peurs et de soumission? La belle-mère, la Goule, vieille femme rêche et mauvaise. Le mari, tout-puissant ?

Zouleikha leur survivra pourtant mais pour un destin aux contours indistincts : la dékoulakisation et l’exil en Sibérie.

C’est un long voyage, qui s’arrêtera pour beaucoup dans une tombe à ciel ouvert. Pour la jeune femme, la vie sera la plus forte. L’ironie aussi : elle qui n’a eu que 4 filles mortes peu après la naissance, conduira sa grossesse jusqu’à son terme pour accoucher d’un fils dans le froid sibérien.

Là où l’hiver règne en maître, la lumière pointe ça et là car la vie malgré tout continue. L’amitié, l’entraide, la peinture, la chasse sans oublier l’amour.

Ivan Ignatov commandant de la communauté de déplacés, est là, tout prêt. Mais sombrer dans les bras d’un homme, meurtrier de son mari, sans être engagée dans les liens du mariage n’est-ce pas là un pêché mortel ?

Zouleikha ouvre les yeux sur sa foi, ses certitudes, sur sa vie de femme et de mère.

« L’assassin de son mari la regardait avec les yeux de son mari et elle se transformait en miel. »

Pas de romantisme dégoulinant mais plutôt une histoire d’amour complexe, en pointillés face aux devoirs de chacun : devoir de son rang et devoir de mère.

Dans un récit limpide,poignant et intense, Gouzel Iakhina dépeint les horreurs de la chasse aux ennemis du peuple mené en Union Soviétique en n’oubliant pas ces éclats de lumière qui transpercent même l’hiver sibérien.

Une pépite trop méconnue à découvrir.

Ignatov ne comprenait pas comment on peut aimer une femme. On peut aimer des choses grandioses : la révolution, le Parti, son pays. Mais une femme ? Et comment peut-on utiliser le même mot pour exprimer son rapport à des choses d’importance si différente : comment mettre sur la même balance une quelconque bonne femme et la révolution ? C’était ridicule. Même Nastassia : elle avait beau être attirante, palpitante, elle n’en restait pas moins une femelle. Passer une nuit, deux, voire six mois avec elle, flatterait sa masculinité, mais cela s’arrêterait là. De quel amour pouvait-on parler? La passion, rien de plus, un feu d’émotions. Tant qu’il brûlait, c’était bon, quand il était consumé, on soufflait sur les cendres qui s’envolaient, et on continuait à vivre.

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