Parmi les prisonniers de guerre en Russie et en Sibérie 1914-1920

Un livre d’Elsa Brändström publié aux éditions Turquoise

parmi les prisonniers de guerre couv

Ce témoignage rare est consacré au sort que connurent les prisonniers du camp des Puissances centrales (allemands, austro-hongrois, turcs, bulgares…) pendant la Première Guerre mondiale. Plus de 2 300 000 d’entre eux furent envoyés du front jusqu’aux camps de transit russes, puis internés dans tout l’Empire, de la Russie occidentale jusqu’aux steppes d’Asie centrale et aux confins de la Sibérie. Beaucoup périrent de froid, de faim ou succombèrent au fléau des épidémies.

Pendant cinq ans, Elsa Brändström visita nombre de ces camps comme déléguée de la Croix-Rouge suédoise et s’efforça inlassablement de procurer aux prisonniers soins médicaux, vivres, vêtements et objets de première nécessité. Elle leur apporta aussi un grand réconfort moral et contribua à leur rendre le sentiment de leur ­dignité d’être humain, ce qui lui valut le surnom d’Ange de Sibérie. Paru originellement en 1921 en suédois, puis en allemand, et publié en français pour la première fois, son texte décrit également l’organisation des aides apportées par les États, les particuliers et les associations en faveur des détenus. Un siècle après les traités de Versailles, cet ouvrage vient enrichir de façon décisive la mémoire de la Grande Guerre. Elsa Brändström (L’Ange de Sibérie), fille d’un haut diplomate suédois, est née à Saint-Pétersbourg en 1888. Après son engagement pendant le conflit, elle créa en Saxe une maison de repos destinée aux anciens prisonniers ainsi qu’un centre d’accueil pour les orphelins de guerre. Exilée aux États-Unis en 1934 pour fuir l’Allemagne de Hitler, elle y porta ­secours aux réfugiés européens qui affluaient. Elle fut inhumée à Stockholm en 1948.


1914-1918 : des millions de morts, l’enfer des tranchées, les gueules cassées. Ce conflit a inspiré nombre d’auteurs, pour autant je n’avais jusqu’alors jamais lu d’ouvrages consacrés aux prisonniers de guerre.

Pourtant c’est un sujet vaste, qui soulève de vraies questions éthiques, qui interroge l’humanité des belligérants dans une période si peu propice.

De nombreuses autres questions purement pratiques se posent également : comment acheminer les prisonniers vers les lieux de détention, comment s’organiseront leurs vies dans ces camps etc.

Ce témoignage d’Elsa Brändström permet d’avoir une vision d’ensemble du destin des prisonniers de guerre de l’Alliance centrale envoyés en Russie.

Cette jeune femme suédoise, a grandi à Saint-Pétersbourg, et décida au début du premier conflit mondial de s’engager comme infirmière pour soigner les soldats blessés. Son destin la conduisit également à faire partie des délégations suédoises.

Elle se rendit ainsi dans les camps de prisonniers afin de constater leurs besoins, leur amener des vivres et courriers, et, tant que faire ce peut, tenter d’améliorer leurs conditions de vie.

Son témoignage, à remettre dans le contexte de l’époque à laquelle il a été écrit, illustre de façon claire et précise les conditions avec lesquelles des soldats vaincus ou des prisonniers civils ont été traités en violation des règles internationales, avec souvent une cruauté criminelle.

Son livre est très complet en ce qu’il éclaire non seulement les conditions de détentions, la vie dans les camps mais également les négociations entre États, par exemple pour organiser les rapatriements réciproques de soldats invalides.

Le tout est fait de courts chapitres allant à l’essentiel. On sent une volonté de synthétiser ce qu’elle a observé et de généraliser son expérience.

Ce qui conduit, paradoxalement, à ce qui m’a gêné parfois dans cette lecture. J’aurais aimé qu’Elsa Brändström s’efface moins derrière son récit. Les moments où on ressent toute sa douleur lorsqu’elle évoque quelques exemples de situations individuelles sont criants de désespoir et touchent davantage que des nombres ou des situations évoquées de façon globale.

C’est au final une lecture intéressante, très pédagogique dans son approche mais pour laquelle j’aurais ressentir davantage l’expérience directe d’Elsa Brändström.

L’atmosphère dans le camp fut bientôt si tendue qu’une mutinerie menaça d’éclater. Ces terribles conditions devaient changer, l’instinct de vie des prisonniers se soulevait contre une mort lente et absurde. Tous savaient qu’un hôpital vide, fermé, était situé tout près et qu’en ville les Russes disposaient de médicaments. Une ambulance américaine envoyée au secours des prisonniers, avec des médecins, des infirmières et du matériel, sollicita d’ailleurs vainement auprès de l’état-major à Irkoustk l’autorisation de se rendre à Sretensk pour y enrayer l’épidémie. La colère et le désespoir des prisonniers grandissaient, car ils savaient qu’ils pouvaient recevoir de l’aide, mais que celle-ci leur était refusée.

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