Un récit de Pete Fromm traduit par Denis Lagae-Devoldère et publié aux éditions Gallmeister

Le garde commença à parler de bois à brûler. Je hochais la tête sans arrêt, comme si j’avais abattu des forêts entières avant de le rencontrer.
– Il te faudra sans doute sept cordes de bois, m’expliqua-t-il. Fais attention à ça. Tu dois t’en constituer toute une réserve avant que la neige n’immobilise ton camion.
Je ne voulais pas poser cette question, mais comme cela semblait important je me lançai :
– Heu… C’est quoi, une corde de bois?
Ainsi débute le long hiver que Pete Fromm s’apprête à vivre seul au cœur des montagnes Rocheuses, et dont il nous livre ici un témoignage drôle et sincère, véritable hymne aux grands espaces sauvages.
Oubliez le printemps qui pointe le bout de son nez, emmitouflez-vous dans un plaid avec une bonne boisson chaude et direction les Rocheuses américaines.
Pete Fromm est un romancier talentueux, mais avant cela, quand il était jeune, il a voulu vivre son rêve de trappeur.
Bon, en fait, il aimait bien les trappeurs mais, c’est par un drôle de concours de circonstances qu’il va décrocher un emploi particulier : passer un hiver à Indian Creek, seul, pour surveiller des œufs de saumon.
Mais ce qu’il faut savoir, c’est que cet hiver dure 7 mois, et que, pendant cette période, les routes sont en grande partie infranchissables, le laissant totalement coupé du monde.
Avec une dose d’inconscience et de folie, voilà Pete Fromm en route pour les Rocheuses.
Et l’aventure.
Celle d’un jeune homme qui ne sait pas grand chose de la survie en milieu sauvage mais qui va l’apprendre. Sans nous occulter ses moments de doutes, ses erreurs aux conséquences potentiellement mortelles.
La solitude qui d’insupportablement présente devient une compagne rassurante.
Pete Fromm réussit à expliquer cet incroyable paradoxe de tout voyageur : cette volonté de retrouver ses proches puis l’impression de vivre sur un rythme parallèle lorsqu’on les retrouve et enfin, l’impérieuse envie de repartir. Familier mais étranger parmi les siens.
D’un récit très personnel, Pete Fromm ne nous laisse jamais de côté, nous entraîne à sa suite dans ce magnifique récit.
Je me suis évadée pendant ces 250 pages et les ai savourées jusqu’à la dernière. Encore un coup de cœur après celui ressenti pour « Mon désir le plus ardent ».
Et vous, aimez-vous Pete Fromm ?
» Ce soir-là, assis dans ma tente lugubre, je repensais sans cesse à ma brève excursion. Je m’en étais tiré sans dégâts, mais je savais que j’avais commis une erreur, couru un risque énorme pour une marmite de haricots et un bain. Au moindre problème, le camion se serait retrouvé immobilisé tout l’hiver, comme celui du vieil homme de Paradise, souvenir vivace d’un moment de frayeur, d’un jour où j’avais été près de céder à la panique de n’avoir rien à faire, si près que j’aurais fichu mon véhicule dans la Selway River pour une marmite de haricots. Mais je comprenais en même temps les avantages de l’isolement. Personne n’en saurait jamais rien. La neige était devenue mon alliée, elle enterrait tous les indices. »
Une réflexion sur « Indian Creek »