La guerre n’a pas un visage de femme

Un livre de Svetlana Alexievitch traduit par Galia Ackerman et Paul Lequesne publié aux éditions J’ai Lu

La Seconde Guerre mondiale ne cessera jamais de se révéler dans toute son horreur. Derrière les faits d’armes, les atrocités du champ de bataille et les crimes monstrueux perpétrés à l’encontre des civils, se cache une autre réalité. Celle de milliers de femmes russes envoyées au front pour combattre l’ennemi nazi. Svetlana Alexievitch a consacré sept années de sa vie à recueillir des témoignages de femmes dont beaucoup étaient à l’époque à peine sorties de l’enfance.

Après les premiers sentiments d’exaltation, on assiste, ou fil des récits, à un changement de ton radical, lorsque arrive l’épreuve fatidique du combat, accompagnée de son lot d’interrogations, de déchirements et de souffrances. Délaissant le silence dans lequel nombre d’entre elles ont trouvé refuge, ces femmes osent enfin formuler la guerre telle qu’elles l’ont vécue. Un recueil bouleversant des témoignages poignants.


La guerre n’a pas un visage de femme ?

Cela n’a pas empêché des femmes soviétiques, des gamines pour beaucoup, de s’enrôler dans l’armée pour combattre les nazis.

Infirmière, brancardière, résistante, soldate…Svetlana Alexievitch les écoute, des années après, raconter leur guerre.

Leur guerre en tant que combattante, mais aussi en tant que femme ou en tant que mère.

Pour beaucoup de ces femmes, combattre c’était défendre sa Patrie, Staline et ses proches. Une évidence et une nécessité. Peu importe les crimes commis par le régime soviétique.

La haine de l’envahisseur nazi domine. Puis vient le baptême du feu, celui qui vous transforme irrémédiablement, vous cheville l’horreur à l’âme. Qui parfois, révèle aussi un geste de compassion face à l’ennemi.

Les morts, les blessés et les blessures. La fatigue telle qu’on ne peut l’imaginer, le corps qui réussit à faire ce que jamais l’on n’aurait pu soupçonner de lui.

L’amour malgré tout, et l’espoir de vivre jusqu’à la victoire.

Et lorsque celle-ci vient la désillusion : les hommes sont célébrés, les femmes traitées de garces.

Et la guerre n’en finit jamais. Elle hante les nuits et bouleversent les vies des femmes qui ont voulu défendre un idéal et y ont perdu leur jeunesse.

Ce livre est comme tous ceux que j’ai pu lire de la Prix Nobel, absolument magnifique et poignant. En regroupant des témoignages, autant de facettes d’une réalité insaisissable, elle nous aide à comprendre, à entrapercevoir ce qu’a été cette guerre d’un point de vue si peu exploité.

Un coup de cœur à lire absolument et découvert dans le cadre du mois de l’Europe de l’Est d’Eva, Patrice & Goran


« Quand nous sommes parties au front, nous avions dix-huit, vingt ans, quand nous sommes revenues nous en avions vingt-deux, vingt-quatre. D’abord ce fut la joie, puis la peur nous est venues : qu’allions-nous faire dans la vie civile ? nos amies avaient eu le temps de décrocher leur diplôme à la fac, mais nous, qu’étions-nous devenues ? Où était passée notre époque ? Notre époque avait été tuée par la guerre. Nous n’étions adaptée à rien, nous n’avions pas de métier. Tout ce que nous connaissions, c’était la guerre. Tout ce que nous savions faire, c’était la guerre. »

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10 réflexions sur « La guerre n’a pas un visage de femme »

    1. Elle n’écrit rien en tant que tel dans ce livre, elle recueille les témoignages, les sélectionne et les ordonne. Mais elle réussit à le faire d’une manière incroyablement complète, émouvante et réussie.

      J’aime

  1. Je te rejoins complètement, le prix Nobel est vraiment mérité pour cette auteure. J’aime la façon si caractéristique qu’elle a de recueillir les témoignages et de rendre cela extrémement vivant et personnel. Je note ce titre ; j’avais beaucoup aimé La Supplication ou encore Derniers témoins.
    Encore merci pour cette nouvelle participation à notre mois thématique !

    Aimé par 1 personne

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