Un roman de Dina Rubina traduit par Marie Lhuillier et publié aux éditions Macha Publishing

Petia, dont le diminutif est Petrouchka en russe, est un artiste marionnettiste au talent unique. Ce qui tombe bien puisque, en Europe de l’Est, Petrouchka désigne également le guignol russe qui se moque de tout et de tout le monde. Sur scène, Petia est accompagné de Liza, l’amour de sa vie, une jeune femme magnifique à la chevelure flamboyante, fine et fragile comme une statuette. Dans leur numéro phare, Liza imite une poupée qui s’anime à la fin de la représentation.
Tout bascule, l’imaginaire aussi bien que le réel, le jour où Liza ne peut plus monter sur scène. Petia décide alors de fabriquer une poupée à son image, Ellis, et monte un numéro avec cette imitation parfaite de Liza. Le voici, tel un Pygmalion, face à sa créature idéale qu’il peut maîtriser à sa guise en tirant les ficelles invisibles qui lient le créateur à sa créature.
La souffrance de Liza, l’originale, face à son double inanimé, est le moteur caché de ce roman, dans lequel on retrouve le style poétique et unique de Dina Rubina, ainsi que son univers plein de couleurs, de bruits, d’odeurs…
Liza et Petia s’aiment. Mais cet amour n’a rien de classique : il a débuté alors qu’ils n’étaient que des enfants mais surtout, cet amour se confronte à un monde étrange, inquiétant : celui des marionnettes.
✨
Car Petia est un passionné. Il donne vie à des êtres désincarnés. Mais il a commis une faute : celle d’avoir créée une marionnette à l’image de sa femme. Une représentation parfaite qui prend une place trop importante dans leur vie.
✨
Ce récit est véritablement très étrange. On navigue dans un univers onirique, dérangeant où des hommes pensent que des êtres de bois peuvent être doués de vies.
✨
Un monde où des malédictions prennent corps. Un récit qui alterne avec les époques, tendant des fils avant que tout prenne sens dans les derniers chapitres.
✨
Après un début déroutant, la magie a opéré et les pages ont défilés devant mes yeux. Rien n’est simple dans cette histoire et surtout pas l’amour.
✨
L’autrice nous entraîne avec un grand talent et une belle plume de Jérusalem à Prague, du présent au passé.
✨
Le monde des marionnettistes s’ouvre à nous et dévoile ses secrets, levant les ombres sur les mystères qui ont jalonné les spectacles de notre enfance.
✨
Ce roman est véritablement inclassable mais j’ai été conquise par sa musique, par sa poésie, ce mélange d’ombre et de lumière.
✨
Et vous, avez-vous envie de le découvrir ?
« D’ailleurs, dans les premiers temps, elle n’était capable de parler que de sa douleur, c’est-à-dire de parler de lui, uniquement de lui, de leur vie et de leur relation. C’est alors qu’elle avait évoqué devant moi toutes leurs pérégrinations (tranches de leur vie dont je ne connaissais pas grand-chose), leurs changements constants de théâtres, leurs gains misérables, avec, pour décor, la province en permanence affamée, alcoolisée et épuisée… C’était dur de l’entendre parler de tout ça, mais je faisais tout pour qu’elle verbalise, comme disent les psychologues, qu’elle évacue toutes les choses négatives, même si, Dieu m’est témoin, on ne sait jamais vraiment, dans toutes ces histoires, à quel moment crève l’abcès plein de pus et quand l’âme commence à perdre son sang. »