Un roman de Andreï Guelassimov traduit par Raphaëlle Pache et publié aux éditions des Syrtes

Tandis qu’aux États-Unis la conquête de l’Ouest se poursuit inexorablement, les Empires russe et britannique se livrent une « guerre froide » en Extrême-Orient. Guennadi Nevelskoï, navigateur obstiné, poussé par une ambition effrénée, obtient l’autorisation officieuse du tsar de lancer une expédition dans cette région. Son but est de trouver une voie navigable sur la côte pacifique, à l’embouchure du fleuve Amour, face à l’île de Sakhaline.
De cette histoire épique et méconnue, Andreï Guelassimov tire un scénario rocambolesque et savoureux. Sans dissimuler une certaine jubilation littéraire, il fait appel tour à tour à des intrigues invraisemblables, des espions écervelés, des bandits ou des mouchards qui s’affrontent dans un suspens où la satire et l’ironie frôlent souvent le lyrisme. Plongé au cœur de ces nombreuses péripéties, le lecteur a le sentiment de toucher du doigt ce qu’il faut d’efforts, d’ingéniosité, d’intrigues et de hasards pour parvenir à une décision politique et humaine capable d’influencer l’histoire du monde.
Avec La Rose des vents Guelassimov choisit de rendre hommage au roman historique et d’aventures. Il revisite les lectures qui ont bercé son adolescence (et la nôtre !), se jouant des codes avec un plaisir facétieux.
Il est des découvertes qui relèvent d’hasards, de coup de poker contre le destin.
✨
La découverte d’une voie navigable sur la côte pacifique, à l’embouchure du Fleuve amour en est un exemple.
✨
Si de prime abord, cet événement n’apparaît pas comme essentiel, il revêtait, cependant, une importance majeure pour l’empire russe du milieu du dix-neuvième siècle.
✨
Une telle voie donnant aux russes un avantage stratégique face à la Chine, dans la revendication de zones frontalières mais, surtout, en cas d’affrontement avec les navires britanniques.
✨
C’est sur cet échiquier mondial qu’un pion, Guennadi Nevelskoï, se trouve engagé.
✨
S’il se retrouve catapulté dans la recherche d’une telle voie navigable, ce sera sans consigne officielle de ses supérieurs.
✨
S’il réussit sa mission, à lui la couronne de lauriers mais en cas d’échec, il gagnera un aller simple pour un châtiment des plus sévères, la déportation à tout le moins…
✨
Ce roman est très dense, l’on sent le travail de recherche immense fait par l’auteur sur ce sujet et cette période. Cela donne un début de roman parfois difficile à suivre.
✨
Mais une fois les repères pris, les machinations au sommet de l’État sont très intéressantes. Les réponses arrivent au compte-gouttes et nous comprenons les événements, comme le personnage principal, au fur et à mesure.
✨
Le reproche que je ferai à ce livre résiderai dans un déséquilibre ressenti à la lecture sur certains points. Au début du roman, il y a de nombreuses digressions sur d’autres personnages dont le sort sera complètement occulté pendant la deuxième partie du roman pour au final, être réglé en quelques phrases à la fin du livre. Et la partie liée à l’exploration maritime, en tant que telle, a été trop rapidement exploitée à mon goût.
✨
Au final, cette lecture m’a permis d’apprendre beaucoup de choses sur l’aspect politique et stratégique de la conquête maritime de cette partie du globe même si je suis restée un peu sur ma faim avec ce roman.
» En vertu d’un long service sur les vaisseaux de la flotte de la Baltique dans l’entourage immédiat du grand-duc Konstantin, que l’empereur avait destiné à une carrière dans la Marine alors qu’il n’avait que cinq ans, Guennadi Ivanovitch Nevelskoï avait pris l’habitude de croiser au quotidien des nantis occupant les plus hauts postes dans l’Empire russe. Presque chacun de ces personnages, comme il eut le temps de le remarquer dans les années les plus précoces de sa carrière d’officier, se distinguait par une bizarrerie ou une autre, et pour certaine d’entre eux, par deux même, quand ce n’était pas trois. Untel ne répondait pas aux salutations quand elles émanaient d’un roux. Tel autre, en grimpant à l’échelle, s’abstenait de regarder ses pieds, sans quoi il s’immobilisait aussitôt et n’était bien souvent protégé de la chute que par un chef de quart informé de cette particularité, qui tenait un marin prêt à le rattraper. »