De l’aigle impérial au drapeau rouge

Un roman de Piotr Krasnov traduit par Xénia Yagello publié aux éditions des Syrtes

Paru à Berlin en 1921-1922, De l’aigle impérial au drapeau rouge rencontra dès sa parution un immense succès littéraire dans l’émigration russe. Dans un style flamboyant, le livre décrit la vie en Russie depuis le règne de Nicolas II jusqu’à la fin de la guerre civile. L’art de Krasnov fait penser à un roman-feuilleton, à l’image de ses prédécesseurs français du XIXe siècle, notamment Alexandre Dumas. Grâce à de nombreux rebondissements et coups de théâtre, l’auteur nous plonge dans le bruit et la fureur de temps devenus lointains, décrivant la fin d’une époque, ne nous épargnant aucune cruauté de la Grande Guerre, de l’agonie de la Russie impériale et de la terreur tchekiste, avec un mélange de mélancolie et de sentimentalisme, de courage et d’euphorie en même temps que d’abattement et de recherche du tragique. Tout cela donne au livre une âme éminemment russe et en fait une grande réussite littéraire.


Une fois n’est pas coutume, cette chronique commencera par quelques mots sur l’auteur de ce roman, Piotr Krasnov.

Ce dernier était un général de la Garde impériale sous Nicolas II mais, également, écrivain militaire. Exilé suite à la révolution russe, il fut livré par les Anglais aux soviétiques et fusillé en 1947.

C’est en 1921-1922 qu’il publia ce roman qui a pour personnage principal le militaire Sabline. 

Nous le découvrons jeune homme, droit, plein de principes puis découvrant la passion amoureuse, fugace et intense, sans se soucier des conséquences.

Un homme dévoué à l’armée, à la Russie, à la foi et à l’empereur.

Les années passent, la sagesse prend le pas sur la fougue. 

Mais les nuages s’amoncellent, tant à l’extérieur avec la première guerre mondiale qu’à l’intérieur avec l’agitation socialiste. 

Cette temporalité constitue un point très positif de ce récit. Je n’ai lu que peu de romans se déroulant sous le règne de Nicolas II et il est très intéressant d’avoir le point de vue d’un contemporain des événements. Nous croisons des personnages fictifs et d’autres bien réels.

On sent toute la dévotion que l’auteur vouait à sa patrie sans pour autant être aveugle aux difficultés et aux abus du tsarisme. La contrepartie de cette dévotion est la vision très noire de la révolution rouge, beaucoup de communistes apparaissant comme monstrueux, opportunistes, marqués physiquement par leur déchéance morale.

J’ai beaucoup apprécié les descriptions de la vie militaire où l’on sent la maîtrise de l’auteur à ce sujet. 

Si je devais apporter un bémol, il résiderait dans la construction psychologique des personnages qui ne m’a pas toujours convaincue. 

Une belle lecture, qui si elle ne restera pas parmi mes favorites, n’en reste pas moins un roman, un témoignage intéressant sur la chute d’un empire.

Et vous, connaissez-vous ce roman ? 


« Dans un espace réservé se tenait la foule brillante des officiers, et Sabline devait s’y trouver. Mais Maroussia sentait qu’en cet instant Sabline et ces jeunes élèves militaires, et tous ces êtres humains, n’étaient rien auprès de l’empereur. C’est ainsi qu’avaient dû apparaître, dans les temps anciens, les tsars moscovites, entourés de leurs boyards, des ryndas et des « enfants Boyars ». Cette majesté éblouissante de cérémonial avait été apportée de Byzance, comme un legs de l’empire d’Orient, et avait éloigné le tsar du peuple, le rendant inaccessible. C’est ce qui avait engendré la légende selon laquelle le tsar serait sacré par Dieu lui-même. »

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