Un roman de Priya Hein publié aux éditions Globe

Riambel, Île Maurice. Derrière les plages de sable fin, c’est dans le bidonville qu’on appelle Africa Town que Noémie grandit. D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, sa mère a toujours travaillé comme domestique dans l’une de ces maisons de l’autre côté de la route, au service d’une famille de Mauriciens blancs, les De Grandbourg.
Par une succession de vignettes, Priya Hein évoque une adolescence passée à la frontière entre deux mondes : celui des créoles du bidonville et des ti lakaz, et celui des blancs qui habitent les maisons de maître. Lorsque Noémie est amenée à travailler chez les De Grandbourg à son tour, à l’aube de ses seize ans, elle effleure pour la première fois un monde auquel elle n’appartiendra jamais, où elle se brûlera les ailes.
Ne vous fiez pas aux couleurs chatoyantes de cette couverture.
Fixez plutôt votre regard sur ces deux profils, sombres, se faisant face, comme si la lumière ne pouvait tout éclairer…
Noémie a 15 ans et vit à Riambel, une ville de l’Ile Maurice.
Elle habite du côté de la rue où les conditions sont rudes, où les métisses et les noirs enchaînent les difficultés. Ce sont des descendants d’esclaves qui, libérés de leurs chaînes, sont toujours coincés entre racisme et pauvreté.
De l’autre côté de la rue, les maisons des blancs.
Une rue qui sépare deux mondes différents.
Noémie aide sa mère dans son travail mais va franchir la ligne qui sépare deux mondes. Une erreur sans conséquence d’un côté de la rue mais fatale pour Noémie.
Ce roman, paru aux éditions Globe, est très réussi. L’autrice nous montre comment l’esclavage, aboli, continue d’influencer la vie des habitants de l’île Maurice, comment, au final, l’exploitation et le racisme sont toujours présents.
Malgré les livres, malgré les professeurs, malgré la mer, le destin de Noémie semble tracé, sans espoir d’une vie meilleure.
L’écriture est très belle, en retenue, alternant les époques. Les chapitres sont courts et sont autant de vignettes permettant de mieux comprendre la vie des mauriciens d’aujourd’hui et d’hier.
J’ai trouvé le tout très poétique et très beau. L’autrice ne raconte pas tout, elle laisse des blancs, aérant le récit entre des recettes de cuisine ou des poèmes. J’ai été embarquée dans cette histoire du début à la fin.
« Chacun est claquemuré dans ses propres ténèbres. Une ombre commence à s’épaissir. Le bruit de ta respiration te surprend. Des bruits légers se font entendre derrière les battements de tes tempes – des échos de pas feutrés, des grincements de portes entrebâillées, des chuchotements. Des voix et des paroles d’autrefois qui s’amplifient et résonnent aux quatre coins de la chambre, présages d’une tempête imminente avant l’explosion. »