Les graciées

Un roman de Kiran Milwood Hargrave publié dans la collection Pavillons des éditions Robert Laffont

1617, Vardø, au nord du cercle polaire, en Norvège.
Maren Magnusdatter, vingt ans, regarde depuis le village la violente tempête qui s’abat sur la mer. Quarante pêcheurs, dont son frère et son père, gisent sur les rochers en contrebas, noyés. Ce sont les hommes de Vardø qui ont été ainsi décimés, et les femmes vont désormais devoir assurer seules leur survie.
Trois ans plus tard, Absalom Cornet débarque d’Écosse. Cet homme sinistre y brûlait des sorcières. Il est accompagné de sa jeune épouse norvégienne, Ursa. Enivrée et terrifiée par l’autorité de son mari, elle se lie d’amitié avec Maren et découvre que les femmes peuvent être indépendantes. Absalom, lui, ne voit en Vardø qu’un endroit où Dieu n’a pas sa place, un endroit hanté par un puissant démon.

Inspiré de faits réels, Les Graciées captive par sa prose, viscérale et immersive. Sous la plume de Kiran Millwood Hargrave, ce village de pêcheurs froid et boueux prend vie.


1617, Vardø, une île au nord du cercle polaire. Les jours sans fin l’été et les nuits interminables d’hiver. La pêche pour survivre, un peu de commerce.

Un jour, le drame : une tempête qui tue 40 hommes – tous les hommes adultes du village. Vardø reste peuplé de femmes, d’enfants et de vieillards. Quelques femmes prennent la décision d’aller pêcher malgré la désapprobation du pasteur, il faut pourtant bien manger. Mais une île dans laquelle les femmes découvrent leurs propres ressources, dérange.

Un homme, Absalom Cornet, est envoyé pour remettre sur le droit chemin ces femmes et punir celles qui seraient allées trop loin.

Avec lui, arrive sa femme, Ursa. Qui observe de plus en plus horrifiée le fanatisme de son époux.

Récit adaptant librement des événements historiques, ce roman est très réussi.

Il dépeint un microcosme féminin fait de heurts et de rivalités. Les femmes de Vardø réagissent toutes différemment au deuil qui les frappent. Certaines se tournent vers la religion, d’autres sombrent dans l’alcool, certaines encore serrent les dents et vont de l’avant.

Le deuil mais pas seulement, le fanatisme, le nom de sorcière utilisé pour régler les querelles. Les procès comme armes pour punir de soit-disant coupables mais aussi s’assurer que les autres resteront dans le « droit chemin ».

Que dire de la condition féminine de cette époque ? Multiples grossesses et mariage sans amour, avec le viol conjugal comme un triste écho à nos réalités contemporaines.

Les femmes ne sont que quantité négligeable, qu’il faut discipliner et surveiller.

Mais, impossible d’occulter le rôle des femmes prêtes aussi à dénoncer leurs voisines et ennemies du village au lieu de faire front commun, la sororité se trouvant limitée à quelques amies proches.

Que dire de plus ? J’espère vous avoir donné envie de le découvrir.

Kirsten a placé les rameuses en fonction de leur taille, Edne et Maren ont la même taille et le même âge, bien qu’Edne soit un peu plus mince. Maren veille à ne pas ramer trop fort afin de rester calée sur elle. A voir la trajectoire sinueuse que dessine le bateau, elle devine que les autres n’ont pas encore compris l’importance d’ajuster leurs coups, de s’adapter au rythme de leur partenaire. Cette tâche l’absorbe tellement qu’elle se rend à peine compte de la distance qui la sépare désormais de la terre, de l’entrée du port qu’elles franchiront bientôt pour gagner la mer, la pleine mer, avec ses baleines et ses phoques et ses tempêtes, et ses hommes noyés jamais revenus à quai.

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