Beauté fatale

Un essai de Mona Chollet publié aux éditions La découverte (poche)

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Soutiens-gorge rembourrés pour fillettes, obsession de la minceur, banalisation de la chirurgie esthétique, prescription insistante du port de la jupe comme symbole de libération : la « tyrannie du look » affirme aujourd’hui son emprise pour imposer la féminité la plus stéréotypée. Décortiquant presse féminine, discours publicitaires, blogs, séries télévisées, témoignages de mannequins et enquêtes sociologiques, Mona Chollet montre dans ce livre comment les industries du « complexe mode-beauté» travaillent à maintenir, sur un mode insidieux et séduisant, la logique sexiste au coeur de la sphère culturelle.


Sous le prétendu culte de la beauté prospère une haine de soi et de son corps, entretenue par le matraquage de normes inatteignables. Un processus d’autodévalorisation qui alimente une anxiété constante au sujet du physique en même temps qu’il condamne les femmes à ne pas savoir exister autrement que par la séduction, les enfermant dans un état de subordination permanente. En ce sens, la question du corps pourrait bien constituer la clé d’une avancée des droits des femmes sur tous les autres plans, de la lutte contre les violences à celle contre les inégalités au travail.


Covid 19, confinement et voilà qu’apparaissent des tweets et autres commentaires tournant en dérision le fait que les femmes, à l’issue de cette période sans salons de coiffures ou d’esthétique, allaient ressembler à Chewbacca.

Humour, répondrons les auteurs de ces messages. Oui, probablement mais pourquoi une fois encore, alors que le monde a bien d’autres chats à fouetter, l’attention est portée sur les poils et autres brushings féminins ?

Mona Chollet se penche dans ce brillant essai sur l’aliénation féminine liée à la beauté, à l’apparence.

Elle ne s’offusque pas contre le désir que les femmes peuvent ressentir de se pomponner mais sanctionne lorsque les femmes sont réduites uniquement à cet aspect de leur vie.

La journaliste étudie notamment le rôle de l’industrie mode-beauté qui nous bombarde de visions stéréotypées de ce qu’est la beauté : une femme jeune, mince, blanche et blonde.

Elle étudie les mécanismes à l’œuvre et les hypocrisies courantes de marques qui prônent la diversité des femmes en Europe pour mieux vendre des produits blanchissants la peau dans d’autres parties du globe.

Amoureux des sacs à main ? Le phénomène des it-bags est décortiqué dans tous ses paradoxes.

Le phénomène des enfants de stars est également étudié. De ces fils ou filles de célébrité qui semblent reproduire une élite, un entre-soi digne des anciens lignages héréditaires.

Mis à part la première partie que j’ai trouvé un peu plus complexe à lire, le reste de l’essai est très accessible.

Je n’ai pas forcément été d’accord avec tous les points de vue défendus par la journaliste (je l’aime bien Sofia Coppola moi 🙊) mais cette lecture est très enrichissante et passionnante.

Je vous la recommande !

Moins ouvertement puante qu’une fille à papa de l’Upper East Side ou une princesse bahreïnie, la it girl, mannequin, actrice, créatrice de mode ou présentatrice de télévision, se situe à un échelon intermédiaire. Fournissant généreusement magazines, blogs et émissions de télévision, elle popularise et démultiplie à l’infini les discours et les images mettant en scène l’idéal de l’hédonisme par la consommation experte. On est vite écœuré par ces litanies d’adresses branchées, de filles cools,  d’amitiés sans nuages, de fous rires, de fêtes, de farniente, de positivité forcenée. Au-delà de sa pénible dimension publicitaire, ce fantasme déraisonnable d’une vie qui ne serait que plaisir et détente, moment exceptionnel sur moment exceptionnel, oublie que seul le contraste permet de les apprécier pleinement. Ils ne prennent sens que s’ils alternent avec des moments où l’on affronte la vie sous tous ses aspects, y compris ceux qui peuvent se révéler sombres, ennuyeux ou pénibles.

2 réflexions sur « Beauté fatale »

  1. Un sujet très intéressant, mais j’ai été déçue par « Sorcières », lu dernièrement, et j’avoue que j’hésite à revenir vers cette autrice… en tous cas le préambule à ton billet est très pertinent ! J’ai entendu qu’aux Etats-Unis, des femmes s’étaient ligués pour que les salons de beauté rouvrent, car « indispensables à leur survie » … certaines entretiennent les diktats qui les réduisent à l’image qu’elles renvoient d’elle-même.. !

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    1. oui, c’est une pensée dans laquelle nous baignons depuis l’enfance et qui renvoie sans cesse les femmes à leur apparence…Il suffit de voir comment les cheveux blancs sont perçus différemment selon qu’ils apparaissent sur la tête d’un homme ou d’une femme…

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