La maison dans laquelle

Un roman de Mariam Petrosyan publié chez Monsieur Toussaint Louverture

Dans la Maison, vous allez perdre vos repères, votre nom et votre vie d’avant. Dans la Maison, vous vous ferez des amis, vous vous ferez des ennemis. Dans la Maison, vous mènerez des combats, vous perdrez des guerres. Dans la Maison, vous connaîtrez l’amour, vous connaîtrez la peur, vous découvrirez des endroits dont vous ne soupçonniez pas l’existence, et même quand vous serez seul, ça ne sera jamais vraiment le cas. Dans la Maison, aucun mur ne peut vous arrêter, le temps ne s’écoule pas toujours comme il le devrait, et la Loi y est impitoyable. Dans la Maison, vous atteindrez vos dix-huit ans transformé à jamais et effrayé à l’idée de devoir la quitter.

Ensorcelante évocation de l’adolescence, La Maison dans laquelle est un chant d’amour à cet âge ingrat et bienheureux, à ses exaltations et ses tragédies, au sentiment de frustration et de toute-puissance qui le traverse. Mariam Petrosyan a réussi à créer un univers bariolé, vivant et réaliste, pétri de cette nostalgie et de cet émerveillement que nous avons tous au fond de nous et qui fait que, parfois, nous refusons de grandir et d’affronter la brutalité du monde qu’on appelle la réalité.


Comment résume-t-on un univers ? Comment réussir à faire entrer dans un cadre quelque chose qui le dépassera forcément ?

La maison dans laquelle est presque impossible à résumer.

Ce livre vous emporte et vous emprisonne dans un monde aussi grand que les murs d’une maison.

Tout au plus, une tentative pourrait être faite en expliquant qu’il s’agit d’une pièce de monnaie.

Côté face : une sorte de pensionnat pour enfants handicapés. On y retrouve le groupe des bons élèves coincés, le groupe des rebelles et les électrons libres. Les professeurs dépassés par ces enfants inadaptés. Chacun fait l’apprentissage de l’amitié, de l’amour de la loyauté et des trahisons.

Côté pile : une Maison, croisement avec un autre monde. Dans laquelle seuls certains auront un rôle à jouer. Une Maison dotée d’une volonté propre dans laquelle peuvent s’exprimer toute la liberté mais aussi la cruauté de ceux qui lui appartiennent.

Sur la tranche de ces deux mondes, une galerie de personnages d’une grande complexité. L’Aveugle, le Sphinx, Chacal..tous semblent sortis non pas de l’imagination de Mariam Petrosyan mais de notre monde à nous. Comme si cette histoire était la nôtre, une histoire que l’on aurait oubliée mais qui reviendrait se rappeler à notre bon souvenir. Car le temps, c’est bien connu, n’est pas linéaire mais tel un cercle…

Roman éblouissant, atypique, dérangeant, passionnant, exigeant de presque 1000 pages qui sont une évasion ou plutôt une immersion sans commune mesure.

N’hésitez pas à passer les portes de cette Maison…


« A l’époque, dans mon article sur le Sépulcre, j’avais analysé le mot « patient ». Je l’avais disséqué en microparticules, pour en arriver à la conclusion qu’un patient ne pouvait être véritablement humain, qu’il s’agissait de deux concepts diamétralement opposés. En devenant « patient », un homme perdait son « moi » ; sa personnalité s’effaçait, ne demeurait alors que son enveloppe corporelle, animale, un mélange de peur et d’espoir, de douleur et de rêve. Nulle trace d’humain, là-dedans. L’humain attendait, quelque part, au-delà des frontières du patient, une possible résurrection. Et, pour l’esprit, il n’y avait rien de plus terrifiant que d’être réduit à un corps. D’où ce surnom de « Sépulcre ». C’était le lieu où l’esprit dépérissait. La peur logée dans ces murs était immuable. Enfant, je ne comprenais pas d’où venait ce mot. Les grands nous l’avaient laissé en héritage, en même temps que la terreur que l’endroit leur inspirait. »

2 réflexions sur « La maison dans laquelle »

  1. Quel beau billet ! Il est sur mes étagères depuis sa sortie, mais plus de 1000 pages… Je repousse le moment de le lire malgré les avis toujours enthousiastes que publient de temps en temps les lectures/trices plus courageux(ses) que moi ! Mais son jour viendra…

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire