La guerre des salamandres

Un roman de Karel Capek traduit par Claudia Ancelot et publié aux éditions Cambourakis

Les « Salamandres » de Capek sont secrètement parvenues, parallèlement à l’homme, à un degré d’évolution presque comparable.
Ce sont de braves créatures peuplant discrètement, à l’abri des requins, certains hauts-fonds de nos côtes maritimes. L’homme (en la personne truculente du Capitaine Van Toch) les découvre d’abord au large de l’Indonésie, sur une petite île sauvage. Ce sont des êtres paisibles, corvéables à merci et mêmes… comestibles.

Asservies, exploitées, les salamandres finiront cependant par se révolter, initiées en cela par la pensée marxiste et sensibilisées aux droits accordés aux ouvriers. Emportées par leur élan, ces dernières découvriront alors l’impérialisme, le nationalisme, grignotant peu à peu l’habitat terrestre, nos côtes s’effondrant dans leurs océans. Succéderont-elles alors à l’homme, seules maîtresses d’un globe aquatique, imitant celui-ci jusque dans sa manie d’autodestruction ?


Le capitaine J. Van Toch, en quête de nouveaux sites fournisseurs de perles va faire une rencontre étonnante : des salamandres, étranges, grandes, laides au possible mais dotées d’une étrange faculté d’apprentissage qui va conduire à un troc improbable : elles fourniront des perles au capitaine en échange de couteaux qui serviront à tuer les requins qui les dévorent.

Les années ont passées et les salamandres se sont multipliées car les hommes ont voulu toujours plus de perles.

Les années ont passées et les salamandres sont exploitées, étudiées et torturées.

Les années ont passées et les salamandres ont obtenu des droits, des devoirs aussi.

Les années ont passées et les salamandres…à vous de le découvrir !

Ce roman de l’auteur tchèque Karel Čapek est d’une très grande finesse d’analyse, d’une effroyable véracité sur l’homme et ses travers.

Le récit commence sur un ton presque absurde avec ce capitaine, spécialiste des coups de colère avant de passer à un ton professoral, journalistique, philosophique.

Tout ceci pour évoquer l’avilissement d’une espèce, son exploitation et le désarroi créée par un ennemi que l’on a,soi-même, fait entrer dans sa maison.

La typographie, les jeux sur les polices de caractères, les encadrés qui parsèment une partie du récit rendent celui-ci incroyablement atypique.

Ce roman est une très belle découverte qui, grâce à un vernis de science fiction parvient avec brio à dépeindre les travers humains : soif de pouvoir et de conquête, égoïsme.

C’est brillant, intelligent, divertissant et une vraie réussite.


« Elles marchaient assez adroitement mais en se dandinant sur leurs pattes de derrière. Elles s’assirent en formant un grand cercle et se mirent à faire tourner leur buste d’un mouvement particulier. On aurait dit qu’elles dansaient. W. Kleinschmidt se leva pour mieux voir. Alors, les salamandres tournèrent la tête vers lui et s’immobilisèrent un instant. Puis, elles commencèrent à s’approcher de lui assez rapidement en émettant des bruits sifflants et des sortes d’aboiements. Quand elles furent à environ sept pas de lui, nous fîmes feu. Elles prirent hâtivement la fuite et se jetèrent à la mer. Elles ne se montrèrent plus ce soir-là. Sur la côte, il ne restait que deux salamandres mortes et l’une à la colonne vertébrale brisée qui émettait un bruit étrange comme « Ogod, ogod, ogod ». Elle mourut plus tard. Quand W. Kleinschmidt ouvrit sa cavité pulmonaire…( Suivent des détails anatomiques que nous autres profanes ne comprendrions pas de toute façon. Les lecteurs spécialisés sont priés de consulter le bulletin précité). »

3 réflexions sur « La guerre des salamandres »

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