Loin d’ici, près de nulle part

Un roman d’Artem Chapeye traduit par Justine Donche-Horetska et publié aux éditions bleu et jaune


Partir travailler à l´étranger ! Voilà une solution qui est censée améliorer la vie d´une famille ukrainienne moyenne, les Tkatchouk : Youriï, Olia et leurs deux enfants. Lui choisit les États-Unis d´où il rentre sans un sou. Elle devient badante, esclave des temps modernes, en Italie. Tous deux croient pourtant qu´ils sont très différents des autres travailleurs migrants et qu´une vie meilleure est encore possible.

Dans un style immédiat et direct, le roman Loin d´ici, près de nulle part cherche à répondre à la question : « Pourquoi tant d´hommes et de femmes dans le monde décident-ils de tout quitter – patrie, famille, amis – et de partir dans un pays lointain où tout est étranger, et où l´avenir est si inconnu et incertain ? »


🇺🇦 Avant la guerre 🇺🇦 

La situation en Ukraine, même avant la guerre, n’était pas très heureuse pour la famille Tkatchouk. 

Youra n’a plus qu’un travail à temps partiel, sa femme Olia vient d’être licenciée. Leur fils aîné est en pleine crise d’adolescence et multiplie les actions xénophobes, leur plus jeune fils dévore les livres, perdu dans son monde.

Youra et Olia s’aiment, mais ne peuvent pas rester ensemble dans leur ville de Bily Sad. Il va falloir trouver une solution pour l’argent, notamment pour payer les études des enfants. 

Youra décide de tenter sa chance six mois aux États-Unis. Lui, l’ingénieur doit devenir ouvrier pour pouvoir envoyer le plus d’argent possible à sa famille. Malheureusement, l’expérience ne se déroulera pas aussi bien que prévu.

Ce sera alors au tour d’Olia de tenter sa chance en qualité de badante, aide à domicile, en Italie auprès de personnes âgées. Un statut de clandestine où il ne faut pas compter les heures, mais qui permet d’envoyer de l’argent à la famille, mais à quel prix…

Autant le dire tout de suite, ce roman m’a beaucoup plu. 

Le destin des Tkatchouk est très sombre et illustre bien la destruction d’une famille qui veut juste une vie meilleure. 

Leur pays ne leur offrant pas une situation économique stable, ils sont condamnés à tenter leur chance ailleurs, et tout s’effondre alors. 

Leur famille se désagrège car chacun avance dans une direction différente, se persuadant d’agir pour le mieux. Comme bien d’autres dans leur situation.

Les enfants sont sans parents, élevés par des grands-parents . L’adultère et les divorces, les vies qui se créent au loin et la maison qui n’en est plus une pour ceux qui partent. 

La xénophobie semble aller de pair avec cette perte de sens social mais là où Serhïï, le fils aîné, multiplie les actions xénophobes en Ukraine, alors que sa mère est l’étrangère en Italie. 

Je n’ai pas lâché ce roman jusqu’à la dernière page, et j’espère que, lorsque la guerre en Ukraine sera terminée, Artem Chapeye aura beaucoup d’autres romans à nous faire découvrir. 


« Ils l’avaient malgré tout renvoyée. Dans le service, il y avait trois candidates au licenciement : Olia, Bileïtchoutchka et Vira Kotchoubeï. C’est le comité syndical qui décidait qui licencier. Ils préparaient l’entreprise publique Télécom à la privatisation. Tout le monde savait déjà que c’était leur oligarque Ihor Nahovitsyn qui la rachetait. Avant la privatisation, ils devaient optimiser Télécom. Mais qui optimiser, ça, ils le décidaient entre eux. On ignorait seulement s’ils renverraient une ou deux personnes de leur service. Une seule, c’était évident : Virka Kotchoubeï, car elle avait moins d’années d’expérience et n’avait pas d’enfants. Mais deux ? « 

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4 réflexions sur « Loin d’ici, près de nulle part »

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